Inoxtag sur l’Everest : l’écologie encore grande absente

Le documentaire du youtubeur Inoxtag intitulé Kaizen est sorti ce samedi 14 septembre 2024. En 2023, il avait annoncé qu’il se lançait le défi de grimper l’Everest et avait commencé une préparation physique d’un an afin de réussir son but.

A 22 ans, le défi qu’il s’est lancé est de taille. Il n’est pas alpiniste, n’a aucune expérience en montagne et comme nous pouvons le voir dans le documentaire, son hygiène de vie était loin d’être exemplaire avant de réaliser un tel exploit sportif.

Si vous êtes amatrice ou amateur de montagne ou de vues à couper le souffle, vous ne perdrez pas votre temps à regarder le documentaire, qui dure tout de même 2H24. Les images de l’Everest sont souvent très impressionnantes et le documentaire est sur ce point une vraie réussite.

En revanche, et comme souvent, l’écologie est encore une fois la grande absente du documentaire. Les messages de motivation et de développement personnel sont là, mais Inoxtag a réussi l’exploit de ne pas évoquer une seule fois ni le réchauffement climatique et son énorme impact sur les glaciers, ni l’empreinte carbone catastrophique d’un tel voyage.

Grimper l’Everest : un caprice de riche ?

Il faut beaucoup de temps et d’argent pour grimper l’Everest. C’est environ 50 000€. Un chiffre confirmé par Inoxtag sur le plateau de Quotidien qui précise que le voyage a coûté 50 000€ par personne.

Nous écrivons par personne, car il n’y est pas allé seul. Inoxtag était entouré d’une petite équipe et de sherpas (guides de haute montagne ou porteurs, dans l’Himalaya).

Sans les sherpas, il le dit lui-même dans le documentaire, la montée de l’Everest est impossible. Ces sherpas ont des vies précaires et risquent leur vie pour que des occidentaux ultra favorisés puissent se faire plaisir. A la 35e minute du documentaire, il discute avec un sherpa qui a perdu un doigt et la sensibilité d’un autre, mais qui retournera “faire l’Everest car c’est une bonne source de revenus“.

Une “leçon de vie”

Inoxtag semble assez lucide sur la situation : “nous les occidentaux, on y va pour le kiff, eux ils y vont pour vivre”.

A ce détail près que ce ne sont pas tous les occidentaux mais bien une poignée d’ultra riches qui grimpent ou tentent de grimper l’Everest. L’aspect social aurait mérité bien plus de 30 secondes dans un documentaire de 2H20.

Les réactions fusent sur les réseaux, notamment sur la conclusion du documentaire et les messages du youtubeur :

Il est certain que les leçons de vie peuvent être plus difficiles à entendre quand elles sont faites par une personne qui peut prendre un hélicoptère dans une montagne vs des femmes et hommes qui se lèvent à 5h du matin et qui font vivre la société française…

Grimper l’Everest : une catastrophe environnementale

Il faut attendre 1H20 pour entendre le mot “pollution”, suivi du mot “surpopulation”. En effet, il y a 400 personnes qui attendent dans un camp de base pour monter. Jusqu’à l’ascension du sommet, l’une des difficultés principales est de gérer les embouteillages sur l’Everest…

Nous aurons également 10 secondes à 2H02 de vidéo sur la pollution au camp 4 et les déchets. C’est à peu près tout ce que vous aurez dans le documentaire sur l’écologie.

Pas un mot sur le changement climatique. Pas un mot sur les glaciers. Et pas un mot sur les allers-retours à Paris en avion lors de sa préparation.

Emettre une critique sur Inoxtag est un exercice risqué et vous serez systématiquement insulté. Mais à toute personne qui regardera le documentaire, posez-vous cette question : quelle est l’empreinte carbone d’un tel voyage ? Faites le test en 5 minutes ici, vous verrez que c’est une horreur et explose très largement le budget carbone qu’un Français devrait avoir au maximum en une année.

Si Inoxtag parle du respect des montagnes et des glaciers, et de “redescendre nos déchets, laisser la montagne comme on l’a trouvée”, c’est possible, mais que dans une certaine mesure. Son voyage est ultra polluant et émetteur en CO2, même s’il n’est fait qu’une fois dans sa vie.

A force de médiatiser la montée et que des influenceurs/youtubeurs s’y rendent, l’Everest devient une poubelle à ciel ouvert.

Cerise sur le gâteau en conclusion du documentaire, Inoxtag évoque la déconnexion digitale à la fin de son documentaire… une déconnexion digitale sponsorisée par Orange. Cela se passe sûrement de commentaire…

Les youtubeurs sont à la ramasse sur l’écologie

Lors de sa sortie, le documentaire était exceptionnellement retransmis au cinéma et en avant première, comme au Grand Rex à Paris. D’autres youtubeurs et influenceurs étaient présents, comme HugoDecrypte, Seb la Frite, Michou, Cyprien, McFly et Carlito, Tibo in Shape, etc.

Sur les réseaux Instagram, Twitter, TikTok, etc., tous vantent les mérites du documentaire d’Inox. Comment faire autrement ? Toute personne qui pourrait dire le contraire serait allumée sur la place publique et ne serait potentiellement plus dans les bons plans, plus invitée.

Dans l’émission Quotidien, Yann Barthès n’a pas non plus évoqué l’impact environnemental d’un tel voyage. Comme si cela n’existait pas, ou qu’il ne fallait pas gâcher la fête.

Il va pourtant falloir que ce monde se réveille et comprenne que le changement climatique a déjà de graves conséquences en France et partout dans le monde et qu’on ne peut plus continuer comme avant.

Le sujet commence doucement à arriver, notamment via Hugo Décrypte et McFly et Carlito. Mais nous sommes encore à des années lumières d’une prise de conscience.

Inoxtag semble avoir une énergie extraordinaire et veut des challenges à la hauteur de ses rêves. Une petite suggestion pour Inox : viens lutter contre le changement climatique, aide-nous à lutter contre les youtubeurs comme le Raptor, qui font de la désinformation sur le sujet. Nous aurons besoin de tout le monde, de ta communauté et des autres youtubeurs et youtubeuses si nous souhaitons éviter l’enfer sur Terre.