Planet-Score : l’étiquette qui verdit la viande rouge ?

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Planet Score miniature Bon Pote
©Crédit Photographie : Bon Pote / Valentine Michel
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Le Planet-score entend être à l’environnement ce que le Nutri-score est à la santé : une étiquette encourageant les achats responsables tout en incitant les producteurs et productrices à rendre leurs produits plus vertueux. Une ambition louable, au regard de l’urgence de la transition agricole et alimentaire.

Mais en pratique et contrairement au Nutri-score, cet affichage environnemental repose sur une méthodologie non transparente et présentant des biais conduisant à sous-évaluer les impacts de l’élevage extensif, en décalage avec le consensus scientifique sur le coût environnemental de la viande rouge. Des pratiques condamnées par les scientifiques que nous avons interrogé(e)s, à l’instar de Valérie Masson-Delmotte, co-présidente du groupe I du GIEC de 2015 à 2023. À la lecture de la méthodologie du Planet Score, celle-ci dénonce “une présentation biaisée de l’état des connaissances liées aux émissions de méthane, sous une forme prétendument scientifique“.

Avec Planet-score, une viande de bœuf peut ainsi se voir attribuer la note “B” ou même “A” – un non-sens au regard de son coût environnemental réel et du signal envoyé aux consommateurs et consommatrices. Décryptage. 

L’affichage environnemental : un enjeu majeur de transparence pour les consommateurs 

Prévue par la loi Climat et Résilience de 2021, l’idée d’un score environnemental obligatoire affiché sur les produits alimentaires est prometteuse. L’ADEME et le Ministère de la Transition écologique travaillent actuellement en ce sens en développant Ecobalyse, un calculateur du coût environnemental des produits. En parallèle, c’est une initiative privée d’affichage environnemental qui a le vent en poupe : Planet-score. 

Planet-score, bientôt incontournable ?

Conçu notamment par l’Institut de l’agriculture et de l’alimentation biologique (ITAB), l’outil Planet-score a vu le jour en 2020-2021 à la faveur d’une expérimentation sur l’affichage environnemental pilotée par le gouvernement et l’ADEME. La marque déposée Planet-score® est aujourd’hui commercialisée par l’entreprise du même nom, et détenue par un fonds de dotation nommé Solid Grounds Institute.

Sa méthodologie se base sur la méthode standard de l’Analyse de cycle de vie (ACV), mais entend dépasser les limites de celle-ci (ex : prise en compte de la biodiversité) en la complétant par de nouveaux indicateurs. Sur cette base, chaque produit se voit attribuer par Planet-score une note globale allant de A à E, trois sous-scores (pesticides, biodiversité, climat) et un pictogramme sur le mode d’élevage. 

Exemples d’étiquettes Planet-score.
Exemples d’étiquettes Planet-score. Source : Note méthodologique Planet-score, version 2.2.

Planet-score fait la course en tête dans la nouvelle bataille de l’étiquetage environnemental. Outre une couverture médiatique très largement favorable, l’outil bénéficie d’un soutien actif de l’UFC-Que-Choisir, qui a intégré Planet-score à son application mobile dès 2023, a appelé à la généralisation de Planet-score à l’échelle européenne en 2024 dans un manifeste, et milite publiquement pour son déploiement. Planet-score invoque également sur son site internet des associations environnementales reconnues telles que Générations Futures, WWF et France Nature Environnement, qui lui ont apporté leur soutien dans une lettre ouverte

Exemples d’articles favorables au Planet-score. A gauche un article de Carbon Cutter, à droite un article du Monde
Exemples d’articles favorables au Planet-score
Associations affichées sur le site internet de Planet-score 
Associations affichées sur le site internet de Planet-score 

Avec 230 entreprises évaluées dans une douzaine de pays, ses étiquettes se multiplient rapidement sur les rayons des supermarchés. Plus de 200 millions d’emballages affichent désormais le Planet-score dans les magasins Monoprix, Biocoop, La Vie Claire, Franprix ou encore Picard, cinq enseignes majeures s’étant engagées à généraliser l’affichage du label sur leurs produits. 

Illustrations de l’étiquette Planet-score sur le site internet de Biocoop (à gauche) et de Picard (à droite).
Illustrations de l’étiquette Planet-score sur le site internet de Biocoop (à gauche) et de Picard (à droite).
[NDLR : nous entourons]

Un outil facilement lisible et qui se veut transparent, scientifiquement rigoureux et exhaustif (25 critères au total), tout en palliant les lacunes des affichages environnementaux traditionnels : sur le papier, Planet-score a donc tout de l’étiquette parfaite.

Des choix méthodologiques contestables et sans justification scientifique du Planet-Score ?

Cependant, la lecture de la note méthodologique de Planet-score la plus récente (mai 2025) interpelle. Illustrant un manque de rigueur, certains chiffres avancés pour justifier les choix méthodologiques ne sont pas sourcés, et peu d’études scientifiques sont citées. 

Exemple de données non sourcées en page 15 de la note méthodologique

La méthodologie n’a fait l’objet d’aucune publication scientifique (contrairement au Nutri-score, à Agribalyse ou aux méthodes ACV). Interrogée sur cette absence, l’équipe de Planet-score défend que “dans un champ scientifique […] soumis à de très vives controverses où le système dominant a échoué à produire des métriques pertinentes pour le secteur agricole et alimentaire […], la notion d’évaluation par les pairs pose question“. Et d’ajouter : “Quels « pairs » peuvent se dire à même de juger objectivement de la pertinence des travaux des uns et des autres ?”. 

Le calcul du score environnemental manque également de transparence. Faute de détails sur l’algorithme permettant d’attribuer une note aux produits, il est impossible de reproduire les calculs sur la seule base de la méthodologie disponible. Alors même que l’outil avait été initialement conçu par l’ITAB, son directeur Emeric Pillet nous a confié qu’”actuellement, l’Institut n’est pas en mesure de reproduire un score avec la formule indiquée dans la dernière note méthodologique de Planet-score“.

On observe de plus des biais méthodologiques significatifs qui convergent systématiquement vers un même résultat : surestimer largement les bénéfices associés aux systèmes de production agroécologiques (bio, élevage extensif) et minimiser les autres critères environnementaux pertinents, tels que les émissions de gaz à effet de serre, la consommation d’eau et l’usage des terres. 

Pour arriver à ce résultat, la méthodologie de Planet-score peut être résumée en une succession de 3 étapes clés. Ses calculs apportent d’abord plusieurs modifications au  score issu de la base de données Agribalyse, qui compile 12 indicateurs environnementaux classiques selon la méthode de l’ACV (Étape n°1). Les valeurs ainsi obtenues sont ensuite comprimées (Étape n°2), puis soumises à 13 paramètres d’évaluation censés capturer les enjeux systémiques non couverts par l’ACV traditionnelle, et prenant la forme de bonus-malus (ex : pesticides, déforestation, antibiotiques, etc.) (Étape n°3). À l’issue de ces 3 étapes, les valeurs sont enfin converties en une note globale.

Étape n°1 : modifier la méthode ACV pour minimiser les impacts de l’élevage

L’ACV constitue la méthode de référence pour évaluer l’impact environnemental d’un produit et jouit d’une reconnaissance largement établie au sein de la communauté scientifique. Cette approche sous-tend plusieurs études de référence, notamment celle de Poore & Nemecek, dont les données ont alimenté de nombreuses analyses comparatives, comme cette infographie de Bon Pote.

Émissions de gaz à effet de serre (GES) pour 100g de protéines
Émissions de GES pour 100g de protéines. Source : Bon Pote

Utiliser l’ACV semble donc être un bon point de départ pour le Planet-score. Toutefois, on apprend dans la note méthodologique que certains indicateurs de l’ACV ont été “retirés”, et d’autres “modifiés”. 

Ainsi, les indicateurs “effets toxicologiques sur la santé humaine”, ”écotoxicité d’eau douce” et “épuisement des ressources en eau” ont été supprimés “en raison de leur manque de robustesse“. 

Si cette limite est effectivement reconnue pour les indicateurs de “toxicité humaine” et d’“écotoxicité”, elle l’est tout autant pour d’autres indicateurs qui n’ont pourtant pas été retirés du calcul, à l’instar de l’utilisation de ressources fossiles ou de l’épuisement des ressources minérales et métalliques. De plus, le choix de supprimer l’indicateur “épuisement des ressources en eau” interroge, celui-ci étant considéré comme suffisamment robuste au sein de la communauté scientifique. Or, l’épuisement des ressources en eau est un indicateur pour lequel la performance de l’élevage est généralement médiocre

Mais cet exemple est loin d’être le seul à avantager certains types d’élevage. En effet, Planet-score applique également une modification majeure à l’ACV sur les émissions d’ammoniac pour les systèmes d’élevage avec accès à l’extérieur, au motif que ces émissions seraient “très sensiblement diminuées lorsque les déjections adviennent sur des surfaces en herbe (70 à 90%)”.

Une affirmation qui ne source pas ses chiffres et qui ne mentionne pas d’autres facteurs qui influencent aussi largement les émissions d’ammoniac, même pour l’élevage à l’herbe. Il en résulte une minimisation de l’impact de l’élevage sur l’acidification des milieux. Sollicité, Planet-score indique que ces chiffres sont issus de cette analyse de l’ADEME et cette publication, respectivement datées de 2013 et 2005.

Le chiffre de 90% issu de l’étude de l’ADEME compare deux archétypes de systèmes complets et opposés (pâturage intégral versus système intensif en bâtiment) et non l’effet marginal de jours de pâturage supplémentaires dans un système mixte, comme le suggère pourtant l’approche “au prorata” de Planet-score. Surtout, l’étude classe l’augmentation du temps de pâturage parmi les leviers relativement peu efficaces.

Selon l’analyse citée par Planet-score, l’augmentation du temps passé au pâturage ne figure qu’au 8e rang des actions les plus efficaces pour réduire les rejets d’ammoniac.
Selon l’analyse citée par Planet-score, l’augmentation du temps passé au pâturage ne figure qu’au 8e rang des actions les plus efficaces pour réduire les rejets d’ammoniac. Source : CITEPA pour l’ADEME, 2013 (p.8)

Usage des terres, changement climatique…

Sur l’usage des terres, Planet-score fait le choix discutable d’exclure les prairies permanentes du calcul de compétition feed/food, c’est-à-dire qu’il considère que les prairies sur lesquelles paissent les ruminants (bovins, chèvres, moutons, etc.) ne constituent pas une utilisation de terres agricoles. Le motif : ces prairies seraient “très rarement valorisables pour produire autre chose que de l’herbe” – une affirmation réductrice qui masque d’autres usages vertueux pouvant être fait des terres (ex : reforestation), et qui passe sous silence le fait que l’élevage bovin est à l’échelle mondiale bien plus une cause de perte de biodiversité que de protection de celle-ci.

Comme le soulignait encore un récent article paru dans Nature Food, l’impact de la viande de ruminants “sur les extinctions d’espèces est environ 340 fois supérieur à celui des céréales, en masse, et environ 100 fois supérieur aux protéines d’origine végétale telles que le soja et autres légumineuses.”

Mais la modification de loin la plus importante concerne l’indicateur “Changement climatique”, qui présente pourtant le plus haut score de robustesse de la méthode ACV. Étudions ainsi deux procédés qui pourraient conduire à minimiser l’impact du méthane sur le dérèglement climatique.

Procédé 1 : détourner l’attention du méthane des ruminants

Les ruminants émettent du méthane, essentiellement par leurs rots. Ce gaz pèse doublement sur l’environnement : par son effet de serre direct, mais aussi indirect – il est un précurseur à la formation de l’ozone, à la fois gaz à effet de serre et polluant. Depuis la période préindustrielle, le méthane s’est ainsi imposé comme le deuxième contributeur au réchauffement climatique après le CO₂ : à lui seul, il est responsable d’une augmentation des températures de +0,5°C, soit 30% du réchauffement global enregistré.

Pourtant, “Planet-score tente délibérément de détourner l’attention des émissions de méthane, ce qui semble très préoccupant”, alerte Valérie Masson-Delmotte, co-présidente du groupe I du GIEC entre 2015 et 2023. Interrogée pour cet article, celle-ci dénonce “une présentation biaisée de l’état des connaissances, sous une forme prétendument scientifique.” 

L’encart de la page 18 de la méthodologie relève de la désinformation scientifique, puisque Planet-score affirme que “les émissions de méthane actuellement observées sont majoritairement d’origine fossile, en lien avec l’exploitation mondiale du pétrole et du gaz”. Une affirmation démentie par de nombreuses études ainsi que le Global Methane Budget 2025, qui rappelle que les émissions de méthane issues de l’agriculture sont presque deux fois plus importantes que celles issues du secteur fossile à l’échelle mondiale. Cette diversion vers les émissions fossiles, totalement hors de propos dans un outil d’évaluation alimentaire, fait écho à une stratégie récurrente des lobbies de la viande consistant à relativiser la responsabilité de l’élevage de ruminants au motif qu’“il y a d’autres choses dont nous devrions nous préoccuper davantage”.

Ci-dessus : source non scientifique citée en page 18 de la note méthodologique
Ci-contre, le consensus scientifique mondial reflété par le Global Méthane Budget, montrant que les émissions de méthane agricole sont ~2 fois plus importantes que celles d’origine fossile 

Mais Planet-score va encore plus loin, puisque le méthane voit sa contribution au changement climatique divisée par 2 via l’usage d’une métrique controversée, appelée “PRG*” (prononcée “PRG étoile”).

Procédé 2: utiliser la métrique du PRG* pour minimiser l’impact climatique du méthane

Pour une même quantité émise, le méthane exerce un réchauffement climatique plus intense que le CO2, mais sur une période plus courte. Ces différences peuvent compliquer la comparaison entre l’impact des émissions de CO2 et de méthane sur le climat, et a donné lieu à la conception de plusieurs indicateurs. La méthode de référence à l’échelle mondiale, appelée “PRG100”, consiste à mesurer le “Pouvoir de Réchauffement Global” d’un gaz par rapport à celui du CO2 sur une période de 100 ans. Avec ce calcul, le PRG du méthane est égal à 27, ce qui signifie qu’1 tonne de méthane émise réchauffe environ 27 fois plus le climat qu’1 tonne de CO2

Pourtant, Planet-score a fait le choix d’adopter un autre outil : le PRG*, développé par Myles Allen et son équipe pour comptabiliser autrement les émissions de méthane. À la différence du PRG100, la valeur du PRG* augmente quand les émissions augmentent, et diminue quand les émissions diminuent – quelle que soit la valeur absolue de ces émissions. Ainsi, une réduction progressive des émissions de méthane suffit à considérer que celui-ci ne contribue “à aucun réchauffement supplémentaire”. 

Détourné de son usage initial, le PRG* peut aller jusqu’à justifier des objectifs de “neutralité climatique” sans réduction réelle des émissions. Valérie Masson-Delmotte propose l’analogie suivante : “Imaginez quelqu’un qui boit une bouteille de cognac chaque matin au petit-déjeuner. Une métrique de type PRG* noterait que cette personne maintient un niveau d’alcoolémie stable dans le temps, et ne devient pas plus ivre d’un mois à l’autre : elle reste à niveau constant d’ivresse. Selon la logique du PRG*, cette personne pourrait revendiquer une « neutralité alcool ». Mais cela ne nous dirait rien vis-à-vis de l’effet de cette consommation stable d’alcool sur sa santé, sa capacité de travail, sa capacité de conduite, et les risques pour cette personne et la société”. 

Un exemple de cherry picking condamné par Valérie Masson-Delmotte

Interrogées sur l’application du PRG* dans leur méthodologie, les équipes de Planet-score relèvent que leurs calculs conduisent à attribuer une valeur de 13,8 au PRG du méthane, soit une division par 2 de l’impact de ce gaz sur le réchauffement climatique par rapport au PRG100. Planet-score justifie ce choix en affirmant que “le GIEC n’a pas statué en faveur de l’une ou l’autre métrique, et précise même que le PRG* […] peut améliorer la quantification de la contribution des gaz au réchauffement climatique (élévation des températures)“. Dans une présentation en ligne de sa méthodologie, Planet-score va même jusqu’à s’appuyer sur les propos de Valérie Masson-Delmotte pour soutenir ce parti pris.

Slide issue d’une d’un webinaire de Planet-score sur la méthodologie de l’outil (p. 82 et p.83).

Valérie Masson-Delmotte condamne cette déformation de ses propos et le mésusage du PRG* par Planet-score : “Il s’agit d’une citation tronquée d’un long fil Twitter, et déformant la complexité du choix de métriques. Utiliser cette citation pour justifier un choix méthodologique arbitraire qui n’est pas étayé par une publication scientifique, comme cela devrait être l’usage pour des indicateurs fournis aux consommateurs, est très surprenant”. Et d’ajouter : “Je suis aussi très surprise de voir que l’argumentaire justifiant la méthodologie du Planet-score remet même en cause l’importance de réduire les émissions de méthane pour limiter le réchauffement climatique. Pourtant souligné dès le début de mon fil Twitter, ce point a disparu de la présentation de Planet-score”. 

Les scientifiques alertent depuis plusieurs années sur les mésusages du PRG*, signalant par exemple qu’il s’agit d’un outil pertinent en tant que modèle, mais pas en tant que métrique. Comme l’a très explicitement rappelé le Haut Conseil pour le Climat : “​​la mise en œuvre du PRG* n’est pas adaptée à des analyses en cycle de vie ou des calculs d’empreinte carbone, puisqu’une baisse des émissions pendant plusieurs décennies donne une valeur négative au PRG* ce qui conduirait à favoriser la consommation de produits rejetant du méthane dans l’atmosphère, dès lors que ces émissions diminueraient”. Les conclusions de l’évaluation du GIEC soulignent donc que “si les conclusions d’analyse en cycle de vie sont sensibles au choix de la métrique d’émissions (type, horizon temporel), les résultats doivent être communiqués très prudemment”.

Des enquêtes récentes menées par Desmog et Novethic ont montré que cet usage du PRG* représentait une véritable aubaine pour l’industrie de la viande rouge et des produits laitiers : “avec ce nouveau calcul, les entreprises et les pays peuvent se déclarer ‘neutres pour le climat’ grâce à de faibles réductions d’émissions d’environ 0,3% par an, bien en dessous de ce que recommandent les évaluations scientifiques”. En France, le lobby bovin INTERBEV, qui a apporté son soutien public au Planet-score dès 2021, a régulièrement fait part de son intérêt pour le PRG*.

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Étape n°2 : une compression des scores qui estompe des différences d’impact pourtant majeures entre les produits 

L’utilisation de l’ACV peut donner lieu à des impacts environnementaux très contrastés selon les produits : un steak de bœuf a par exemple un impact global 30 fois supérieur à celui du tofu selon Agribalyse. Pour reporter ces différences sur une étiquette ne proposant que 5 notes allant de A à E, Planet-score transpose les scores issus de l’ACV sur une échelle logarithmique fermée allant de 0 à 100.

Comme l’explique Anne-Claire Asselin, experte environnement et biodiversité ayant contribué à l’élaboration de la méthodologie initiale de Planet-score via son cabinet de conseil SAYARI, cette transformation mathématique “atténue les fortes valeurs ACV tout en créant un effet de zoom sur les petites”. Anne-Claire Asselin précise que SAYARI s’est retiré du projet Planet-score en août 2022 “pour divergence scientifique”.

Illustration de la transposition à une échelle logarithmique des scores issus de l’ACV modifiée. 
Source : Anne-Claire Asselin.

La méthode logarithmique est donc intrinsèquement favorable aux produits à fort impact environnemental (comme les produits carnés), qui voient l’écart qui les séparaient initialement des produits végétaux se réduire fortement.

Étape n°3 : attribuer des bonus-malus non justifiés

Après avoir modifié l’ACV et comprimé les scores, Planet-score applique à ces scores 13 paramètres additionnels, qui s’apparentent à des bonus-malus évaluant les “enjeux systémiques” dans une approche qui s’inspire des limites planétaires. 

Bonus-malus attribués par Planet-score en complément de l’ACV modifiée. 
Bonus-malus attribués par Planet-score en complément de l’ACV modifiée. 
NDLR : nous ajoutons les couleurs. 

Si la démarche n’est pas dénuée d’intérêt, aucun argument n’est fourni dans la note méthodologique pour justifier l’ajout de ces 13 paramètres spécifiques à ceux de l’ACV. Interrogée, l’équipe de Planet-score répond que ces indicateurs “ont été déterminés pour couvrir tous les domaines, notamment ceux très nombreux et très importants manquants dans l’ACV”. Une explication qui interroge, puisqu’au moins 7 des 13 paramètres ajoutés par Planet-score sont en réalité déjà pris en compte dans l’ACV utilisée par Agribalyse, qui sert de point de départ aux calculs de Planet-score. Appliquer ces 7 paramètres aux produits revient donc à comptabiliser deux fois l’impact environnemental du transport aérien, des serres chauffées, des engrais de synthèse, de la déforestation importée, des emballages, de l’irrigation, ou encore du stockage de carbone des prairies.

En outre, les valeurs des bonus-malus interrogent, tant leur poids (-25, +20, etc.) écrase les valeurs de l’échelle logarithmique comprises entre 0 et 100, comme le déplorait d’ailleurs le Conseil scientifique pour l’affichage environnemental, présidé par l’INRAe et missionné par le gouvernement. Anne-Claire Asselin abonde : “l’approche logarithmique […] fonctionne très bien pour les différences inter-catégories, mais Planet-score applique ensuite des bonus et malus après application du logarithme. Cette méthode de calcul crée un gros effet de loupe en intra-catégorie qui permet même à du bœuf d’obtenir la note A“.

Répartition des notes de Planet-score selon différents produits. La note médiane de Planet-score pour le bœuf est “C”, et plusieurs références obtiennent même les notes “B” ou “A” [NDLR : nous entourons], au même titre que certains produits végétaux. Même issu de l’élevage extensif, le bœuf demeure pourtant l'un des aliments ayant le plus fort impact sur l'environnement selon le consensus scientifique. Source du graphique : Le Monde, d’après Planet-score. 
Répartition des notes de Planet-score selon différents produits. La note médiane de Planet-score pour le bœuf est “C”, et plusieurs références obtiennent même les notes “B” ou “A” [NDLR : nous entourons], au même titre que certains produits végétaux. Même issu de l’élevage extensif, le bœuf demeure pourtant l’un des aliments ayant le plus fort impact sur l’environnement selon le consensus scientifique. Source du graphique : Le Monde, d’après Planet-score. 

Un nombre de points bonus et malus inexpliqué sur la méthodologie du Planet-Score

En dépit de nos questions, aucune explication chiffrée ne nous a été apportée  pour justifier les valeurs attribuées à ces bonus-malus. Par exemple, utiliser des ingrédients associés à la déforestation importée ne peut pénaliser un produit que de 4 points. Serait-ce parce que l’élevage est l’un des principaux responsables de cette déforestation importée ? Impossible de le savoir puisque la manière dont sont décidées les valeurs des bonus et malus n’est précisée ni dans la note méthodologique, ni dans la réponse qui nous a été envoyée. 

Pour l’indicateur “Biodiversité à la parcelle” (qui peut apporter un bonus considérable de 20 points), le Planet-score s’appuie sur le “BioSyScan”, un outil de diagnostic qui évalue l’impact potentiel des pratiques agricoles sur la biodiversité à l’échelle de l’exploitation. Détenu par le même fonds de dotation que Planet-score (Solid Grounds Institute), sa méthodologie n’a fait l’objet d’aucune publication scientifique, et un groupement scientifique composé notamment de l’ADEME et de l’INRAe concluait récemment que l’application du BioSyScan n’était “pas compatible avec les données d’Agribalyse issues de l’ACV, ce que fait pourtant Planet-score.

Interrogé à ce propos, Planet-score met en avant une évaluation positive du BioSyScan par le Comité d’expertise scientifique interdisciplinaire sur l’affichage environnemental (CESIAe), un collectif de chercheur·euses qui ne bénéficie pas de reconnaissance institutionnelle.  Sa production se limite à 3 rapports non revus par les pairs et dans lesquels la défense de Planet-score occupe une place notable. Contacté, le CESIAe précise s’être constitué sur invitation de l’UFC-Que Choisir auprès du Ministère de la Transition Écologique, et nie tout lien contractuel ou de collaboration avec Planet-score.

Comment le Planet-Score évalue les pesticides ?

Pour l’usage des pesticides qui constitue le plus important malus (jusqu’à -25 points), il est précisé que “le développement de cet indicateur fait l’objet de travaux spécifiques en vue de publication”. Interrogée sur ce point, l’entreprise Planet-score refuse de divulguer les détails de cette méthodologie, invoquant des “droits de propriété intellectuelle la protégeant” et la nécessité de “préserver son savoir-faire“. L’organisation compare sa démarche à celle de l’UFC-Que Choisir pour les additifs alimentaires ou du WWF pour la pêche. Cette réponse interroge : comment vérifier la robustesse d’un calcul dont la formule reste secrète ?

Enfin, relevons la manière dont est encore une fois favorisé l’élevage extensif à travers les points bonus accordés aux prairies permanentes “dans la mesure où le retour de ces surfaces en cultures arables représenterait un déstockage important de GES (CO₂)” selon la méthodologie. 

Au-delà du problème de double comptage décrit précédemment, la littérature scientifique démontre qu’une prairie permanente ne séquestre pas du carbone indéfiniment, et certainement pas suffisamment pour compenser les émissions de méthane des ruminants qui y paissent. S’il est donc nécessaire de s’assurer que les prairies actuelles ne soient pas transformées en culture, il est délicat de justifier rigoureusement le fait d’accorder de cette manière des points bonus aux produits issus de l’élevage extensif, qui demeure un contributeur net au réchauffement climatique. 

Planet-Score : des choix d’invité(e)s et une stratégie de communication qui interrogent 

Planet-score a récemment invité à l’un de ses webinaires la journaliste Nina Teicholz, dont un récent rapport révèle qu’elle est la deuxième principale “désinfluenceuse” pro-viande à l’échelle mondiale. Suite à la controverse générée par cette invitation, Planet-score a justifié son choix par l’envoi d’un mail aux participant(e)s du webinaire, affirmant que Nina Teicholz était “libre de tout conflit d’intérêt et n'[avait] de lien avec aucun industriel ou secteur économique ou courant idéologique”.

Pour Planet-score, la journaliste ferait partie “d’experts ciblés actuellement par une campagne-bâillon visant à empêcher toute discussion sur le fond des enjeux nutritionnels”. Nina Teicholz soutient notamment que le taux d’obésité aux États-Unis a augmenté à cause des régimes végétariens et de la baisse de la consommation de viande, et promeut la tendance des “bébés carnivores”. 

Image 1 : Affiche du webinaire organisé par Planet-score et Solid Grounds Institute en présence de Nina Teicholz
Image 2 : Nina Teicholz figure dans le top 2 des “désinfluenceurs” pro-viande à l’échelle mondiale, révèle le rapport “Meat vs EAT-Lancet: The dynamics of an industry-orchestrated online backlash

Présidente et porte-parole de Planet-score, Sabine Bonnot tient des discours proches des éléments de langage de la filière viande. Par exemple, lors d’une intervention récente pour “Le Monde”, celle-ci affirme que “selon les calculs de Planet-score, les élevages [extensifs de ruminants], seraient même « les seuls à avoir la capacité d’être stockeurs nets » de carbone, ce qui signifie qu’ils auraient un impact climatique positif“.

Un mythe démystifié mais régulièrement répété par l’industrie de la viande, qui prétend que le bœuf nourri à l’herbe aurait un bilan positif sur le climat. Un article publié cette année dans la prestigieuse revue PNAS rappelait pourtant une fois encore que le bœuf nourri à l’herbe émet autant de gaz à effet de serre que le bœuf industriel.

Conclusion : que penser du Planet-score ?

Le Planet-score n’est pas dénué de qualités. Sa prise en compte des conditions d’élevage, sa volonté de dépasser les limites reconnues de l’ACV et la grande lisibilité de ses étiquettes témoignent d’une ambition louable. 

Cependant, cette étiquette environnementale présente des failles méthodologiques majeures : références scientifiques incomplètes, ajout de bonus-malus occasionnant des doubles comptages, absence de justification du nombre de points attribués à chaque bonus-malus, etc. 

Des choix méthodologiques comme le mésusage du PRG*, ainsi que certains éléments de communication de Planet-score, tendent même à minimiser la nécessité de réduire notre consommation de viande pour limiter le réchauffement climatique. Un impératif pourtant bien établi par le consensus scientifique, qui souligne que les émissions mondiales de méthane doivent reculer de moitié d’ici à 2050 pour limiter le réchauffement à +2°C en 2100. 

L’urgence climatique et la crise de biodiversité exigent des outils d’évaluation environnementale dotés d’une méthodologie transparente, reproductible et validée scientifiquement. Car un étiquetage environnemental dont les résultats s’écartent du consensus scientifique risquerait de ne pas remplir pleinement sa mission : guider les citoyens et citoyennes vers des choix alimentaires véritablement durables.


Auteurs : 

  • Tom Bry-Chevalier, doctorant sur les enjeux environnementaux et économiques des protéines alternatives
  • Victor Fighiera, consultant-formateur sur les enjeux agricoles et alimentaires, producteur agroalimentaire bio

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7 Responses

  1. Je suis un peu gêné par le fait que Victor Fighiera, qui donne des leçons de transparence tout au long de cet article, signe ledit article, en tant que “consultant-formateur sur les enjeux agricoles et alimentaires, producteur agroalimentaire bio” sans juger bon de préciser qu’il est également fondateur de l’entreprise « Tofu du Poitou » … Or, comme il l’indique dans son article, selon la méthodologie des ACVs – méthode dont l’auteur se fait le champion – le tofu a un impact 30 fois inférieur à celui d’un steak de boeuf …

    De plus, je ne suis pas scientifique, mais si je juge le Planet-score au résultat, c’est-à-dire aux scores que ce score permet de produire, tel qu’illustré dans le graphe du Journal du Monde ci-dessus, je constate que :
    – Les scores permettent de choisir au sein d’une même catégorie le produit le plus vertueux ; si donc je souhaite acheter de la viande de boeuf, je serai en mesure de choisir celle qui a le moins d’impact sur l’environnement
    – Et idem pour un légume ou un fruit: si je veux acheter des pommes, je pourrais choisir les pommes qui ont eu le moins de pesticides, ou autres impact sur la biodiversité.

    Le Planet-score oriente donc les consommateurs vers une consommation plus durable.

    Si, en revanche, je n’ai que l’information provenant des ACV, je vais juste voir que je peux remplacer mon bœuf par du tofu, mais j’aime pas le tofu et je n’ai pas l’intention de me passer de bœuf, donc j’oublie vite cette info…

    De même, côté producteur, si je suis éleveur bovin, et que je vois que certains éleveurs pionniers parviennent à obtenir un très bon score, je suis très motivé pour (i) aller voir quelle méthode de production permette d’obtenir ces bons scores, (ii) tenter d’améliorer mes pratiques et (iii) peut être avoir une meilleure rémunération.

    Ainsi, ce score tire vers le haut toute la profession..

    Si en revanche, je n’ai que l’information provenant des ACVs, je vois que la viande de bœuf est 30 fois plus impactante que le tofu… mais je ne vais pas devenir producteur de tofu, alors…. J’oublie vite ce score et je me dit que c’est encore un truc de parisien….

  2. Très gros travail, merci d’avoir synthétisé tout ça.

    La transparence est indispensable pour ce genre de score, le lobby du bio reste un lobby et voir du boeuf en ecoscore A est choquant.

  3. Plusieurs choses dans cet article:

    – Un label ou une note est forcément sous entendu par des choix politiques car la définition même de l’alimentation durable n’est pas consensuelle. On le voit bien avec la question de l’élevage. Certains considèrent que la transition doit passer par plus de viande. D’autres seulement en extensifs car a des impacts environnementaux positifs notamment en termes d’engrais. D’autres que par de l’intensif pour réduire l’impact carbone. Ici ils ont fait le choix de favoriser bio et l’agroécologiques et ça s’entend.

    – Ensuite, agribalyse est très critiqué en matière alimentaire et à juste titre. L’analyse se base avant tout sur l’impact carbone et ne prend pas en compte les autres aspects qui doivent se penser ensemble: biodiversité et santé. Cela conduit ainsi à ce qu’agribalyse favorise les élevages intensifs (car moins de terre utilisé et + d’animaux) alors que l’on sait les conséquences déplorables de ces élevage.Là encore pas de définition commune de la durabilité ce qui amène à des choix contestables et des biais.

    – Enfin, pour moi cet article est contreproductif pour partie. Il faut développer les modèles agroécologiques et biologiques et le GIEC ne dit pas autre chose. Bien sur que cela suppose de manger moins de viande MAIS le message à passer c’est + de bio + d’extensif et à mort l’intensif, pas autre chose (mais c’est mon avis).

  4. Merci pour cet article intéressant, qui met en lumière plusieurs problématiques, notamment celles liées au manque de transparence du Planet Score, ainsi que la question centrale de la position de certain·e·s de ses membres sur le volet nutrition. J’espère à ce titre que cet article ouvrira la voie à des évolutions sur ces aspects.
    Il faut cependant reconnaître que le Planet Score a le mérite de dépasser le réductionnisme consistant à associer la notion d’environnement au seul climat. Ce cadrage limité conduit souvent à des choix qui, tout en améliorant un aspect environnemental, en dégradent d’autres. Ce constat a d’ailleurs été clairement souligné dans l’atelier co-organisé par l’IPBES et le GIEC sur la biodiversité et les changements climatiques (Pörtner et al., 2021). On ne pourra pas préserver l’environnement si, pour améliorer l’une de ses composantes, on en détériore une autre !!
    Concernant l’évaluation des aliments, la démarche Planet Score prend le contre pied des démarches Agribalyse/Éco-score, qui selon moi présentent des limites encore plus importantes. Notamment la réflexion en kilogramme de produit qui s’inscrit dans des logiques d’intensification déjà présente dans l’agriculture conventionnelle et comporte un large risque d’effet rebond. De plus, l’absence de distinction entre les différents modes de production est particulièrement problématique : lorsqu’on parle d’environnement, comment ne pas prendre en compte l’usage des pesticides ou des engrais minéraux ?
    Enfin, sur la question de la viande, ces approched conduisent à privilégier la consommation de volaille et de porc (filières les plus intensives, cf. L214 – Statistiques sur l’élevage intensif) qui reposent sur l’importation massive de céréales et de tourteaux (principalement de soja d’amérique) qui lui est responsable en partie de la déforestation (pas comme le soja français).
    De plus, comme le montre le graphique de l’article du Monde, le Planet Score a le mérite de rappeler qu’un aliment d’origine végétale n’est pas nécessairement vertueux pour l’environnement. Si la logique « végétal = vertueux » peut se vérifier sur le plan climatique, elle n’est pas transposable à l’ensemble des enjeux environnementaux. De nombreuses productions végétales ont un impact écologique désastreux, tandis que certaines formes d’élevage peuvent, dans certains contextes, s’avérer plus vertueuses. (Je vous laisse comparer un champ de blé en Beauce avec un élevage de races rustiques en zone Natura 2000…).
    Certes, ces élevages restent minoritaires en France — et c’est bien pour cela que la plupart des produits animaux n’affichent pas de Planet Score —, mais nier cette réalité ne nous aidera pas à avancer sur les questions environnementales. Pire, refuser de distinguer les différents types d’agriculture risque de nous faire reculer.

  5. L’impact environnemental de l’élevage ne se réduit pas aux seuls effets négatifs (méthane, pollution du sol et des eaux). Il ne faut pas oublier que les prés séquestrent d’énormes quantités de carbone à condition que des pratiques vertueuses soient respectées (élevage extensif, pas de labours). De plus les paysages européens ont été largement modelés par les pratiques humaines d’élevage qui ont favorisé l’émergence d’une biodiversité propre à ces espaces ouverts. En bref, l’élevage n’a pas que des effets négatifs. Il faut ajouter qu’une bonne partie de notre alimentation est liée à la viande : le fromage et les laitages d’une manière générale, les œufs pour la volaille etc. La viande apporte des nutriments qu’elle est seule à apporter, par exemple la vitamine B12. Il ne faut pas tout confondre dans un modèle unique, la consommation excessive et de mauvaise qualité et le manque de transparence du nutriscore.

    Cette polarisation sur la viande est ridicule. Il vaudrait bien mieux lutter contre les vrais problèmes : les élevages industriels, l’importation de viande inscrite dans des accords multilatéraux… pour augmenter la qualité et permettre une meilleure rémunération des paysans qui pratiquent une multiactivité combinant la production de céréales, de fruits et légumes, un petit élevage et une transformation sur place de leurs produits bio ou en transition bio. Je m’approvisionne dans un magasin paysan dont les adhérents relèvent de ce modèle. Leurs produits sont d’une qualité sans comparaison avec ceux de la grande distribution. Ils connaissent un succès retentissant après 6 ans d’existence. Leur dire qu’il faut cesser d’élever des bêtes, donc de produire de la viande, c’est tordre le cou à tout ce qu’ils ont mis en place. L’UFC-Que choisir a raison de soutenir le score même s’il doit être plus explicite et donc amélioré.

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7 Responses

  1. Je suis un peu gêné par le fait que Victor Fighiera, qui donne des leçons de transparence tout au long de cet article, signe ledit article, en tant que “consultant-formateur sur les enjeux agricoles et alimentaires, producteur agroalimentaire bio” sans juger bon de préciser qu’il est également fondateur de l’entreprise « Tofu du Poitou » … Or, comme il l’indique dans son article, selon la méthodologie des ACVs – méthode dont l’auteur se fait le champion – le tofu a un impact 30 fois inférieur à celui d’un steak de boeuf …

    De plus, je ne suis pas scientifique, mais si je juge le Planet-score au résultat, c’est-à-dire aux scores que ce score permet de produire, tel qu’illustré dans le graphe du Journal du Monde ci-dessus, je constate que :
    – Les scores permettent de choisir au sein d’une même catégorie le produit le plus vertueux ; si donc je souhaite acheter de la viande de boeuf, je serai en mesure de choisir celle qui a le moins d’impact sur l’environnement
    – Et idem pour un légume ou un fruit: si je veux acheter des pommes, je pourrais choisir les pommes qui ont eu le moins de pesticides, ou autres impact sur la biodiversité.

    Le Planet-score oriente donc les consommateurs vers une consommation plus durable.

    Si, en revanche, je n’ai que l’information provenant des ACV, je vais juste voir que je peux remplacer mon bœuf par du tofu, mais j’aime pas le tofu et je n’ai pas l’intention de me passer de bœuf, donc j’oublie vite cette info…

    De même, côté producteur, si je suis éleveur bovin, et que je vois que certains éleveurs pionniers parviennent à obtenir un très bon score, je suis très motivé pour (i) aller voir quelle méthode de production permette d’obtenir ces bons scores, (ii) tenter d’améliorer mes pratiques et (iii) peut être avoir une meilleure rémunération.

    Ainsi, ce score tire vers le haut toute la profession..

    Si en revanche, je n’ai que l’information provenant des ACVs, je vois que la viande de bœuf est 30 fois plus impactante que le tofu… mais je ne vais pas devenir producteur de tofu, alors…. J’oublie vite ce score et je me dit que c’est encore un truc de parisien….

  2. Très gros travail, merci d’avoir synthétisé tout ça.

    La transparence est indispensable pour ce genre de score, le lobby du bio reste un lobby et voir du boeuf en ecoscore A est choquant.

  3. Plusieurs choses dans cet article:

    – Un label ou une note est forcément sous entendu par des choix politiques car la définition même de l’alimentation durable n’est pas consensuelle. On le voit bien avec la question de l’élevage. Certains considèrent que la transition doit passer par plus de viande. D’autres seulement en extensifs car a des impacts environnementaux positifs notamment en termes d’engrais. D’autres que par de l’intensif pour réduire l’impact carbone. Ici ils ont fait le choix de favoriser bio et l’agroécologiques et ça s’entend.

    – Ensuite, agribalyse est très critiqué en matière alimentaire et à juste titre. L’analyse se base avant tout sur l’impact carbone et ne prend pas en compte les autres aspects qui doivent se penser ensemble: biodiversité et santé. Cela conduit ainsi à ce qu’agribalyse favorise les élevages intensifs (car moins de terre utilisé et + d’animaux) alors que l’on sait les conséquences déplorables de ces élevage.Là encore pas de définition commune de la durabilité ce qui amène à des choix contestables et des biais.

    – Enfin, pour moi cet article est contreproductif pour partie. Il faut développer les modèles agroécologiques et biologiques et le GIEC ne dit pas autre chose. Bien sur que cela suppose de manger moins de viande MAIS le message à passer c’est + de bio + d’extensif et à mort l’intensif, pas autre chose (mais c’est mon avis).

  4. Merci pour cet article intéressant, qui met en lumière plusieurs problématiques, notamment celles liées au manque de transparence du Planet Score, ainsi que la question centrale de la position de certain·e·s de ses membres sur le volet nutrition. J’espère à ce titre que cet article ouvrira la voie à des évolutions sur ces aspects.
    Il faut cependant reconnaître que le Planet Score a le mérite de dépasser le réductionnisme consistant à associer la notion d’environnement au seul climat. Ce cadrage limité conduit souvent à des choix qui, tout en améliorant un aspect environnemental, en dégradent d’autres. Ce constat a d’ailleurs été clairement souligné dans l’atelier co-organisé par l’IPBES et le GIEC sur la biodiversité et les changements climatiques (Pörtner et al., 2021). On ne pourra pas préserver l’environnement si, pour améliorer l’une de ses composantes, on en détériore une autre !!
    Concernant l’évaluation des aliments, la démarche Planet Score prend le contre pied des démarches Agribalyse/Éco-score, qui selon moi présentent des limites encore plus importantes. Notamment la réflexion en kilogramme de produit qui s’inscrit dans des logiques d’intensification déjà présente dans l’agriculture conventionnelle et comporte un large risque d’effet rebond. De plus, l’absence de distinction entre les différents modes de production est particulièrement problématique : lorsqu’on parle d’environnement, comment ne pas prendre en compte l’usage des pesticides ou des engrais minéraux ?
    Enfin, sur la question de la viande, ces approched conduisent à privilégier la consommation de volaille et de porc (filières les plus intensives, cf. L214 – Statistiques sur l’élevage intensif) qui reposent sur l’importation massive de céréales et de tourteaux (principalement de soja d’amérique) qui lui est responsable en partie de la déforestation (pas comme le soja français).
    De plus, comme le montre le graphique de l’article du Monde, le Planet Score a le mérite de rappeler qu’un aliment d’origine végétale n’est pas nécessairement vertueux pour l’environnement. Si la logique « végétal = vertueux » peut se vérifier sur le plan climatique, elle n’est pas transposable à l’ensemble des enjeux environnementaux. De nombreuses productions végétales ont un impact écologique désastreux, tandis que certaines formes d’élevage peuvent, dans certains contextes, s’avérer plus vertueuses. (Je vous laisse comparer un champ de blé en Beauce avec un élevage de races rustiques en zone Natura 2000…).
    Certes, ces élevages restent minoritaires en France — et c’est bien pour cela que la plupart des produits animaux n’affichent pas de Planet Score —, mais nier cette réalité ne nous aidera pas à avancer sur les questions environnementales. Pire, refuser de distinguer les différents types d’agriculture risque de nous faire reculer.

  5. L’impact environnemental de l’élevage ne se réduit pas aux seuls effets négatifs (méthane, pollution du sol et des eaux). Il ne faut pas oublier que les prés séquestrent d’énormes quantités de carbone à condition que des pratiques vertueuses soient respectées (élevage extensif, pas de labours). De plus les paysages européens ont été largement modelés par les pratiques humaines d’élevage qui ont favorisé l’émergence d’une biodiversité propre à ces espaces ouverts. En bref, l’élevage n’a pas que des effets négatifs. Il faut ajouter qu’une bonne partie de notre alimentation est liée à la viande : le fromage et les laitages d’une manière générale, les œufs pour la volaille etc. La viande apporte des nutriments qu’elle est seule à apporter, par exemple la vitamine B12. Il ne faut pas tout confondre dans un modèle unique, la consommation excessive et de mauvaise qualité et le manque de transparence du nutriscore.

    Cette polarisation sur la viande est ridicule. Il vaudrait bien mieux lutter contre les vrais problèmes : les élevages industriels, l’importation de viande inscrite dans des accords multilatéraux… pour augmenter la qualité et permettre une meilleure rémunération des paysans qui pratiquent une multiactivité combinant la production de céréales, de fruits et légumes, un petit élevage et une transformation sur place de leurs produits bio ou en transition bio. Je m’approvisionne dans un magasin paysan dont les adhérents relèvent de ce modèle. Leurs produits sont d’une qualité sans comparaison avec ceux de la grande distribution. Ils connaissent un succès retentissant après 6 ans d’existence. Leur dire qu’il faut cesser d’élever des bêtes, donc de produire de la viande, c’est tordre le cou à tout ce qu’ils ont mis en place. L’UFC-Que choisir a raison de soutenir le score même s’il doit être plus explicite et donc amélioré.

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